Dans les années 1960, je
me suis livré à une petite expérience dans le quatorzième
arrondissement de Paris. J'étais alors un très jeune homme. Ça
devait se passer vers 1964-1966, quand j'avais entre treize et quinze
ans. Chaque fois que je croisais une jeune fille, je la regardais
droit dans les yeux. Toutes aussitôt baissaient les yeux. Exceptée
une que j'ai croisé entre les deux squares devant la mairie de
l'arrondissement. Plus tard, dans le Paris des années 1980, je me suis intéressé aux
divers artifices utilisés alors par les jeunes filles pour regarder
les jeunes hommes.
Un classique était de
les regarder dans le reflet intérieur des fenêtres des voitures du
métro. Un autre, porter des lunettes de soleil. Un exercice amusant
consistant à fixer les lunettes et voir la jeune fille baisser la
tête ! Puis aussi, le regard balayant un segment du champ visuel où
se trouve un jeune homme. Le regard du coin de l'œil ou le coup
d'œil très bref : je suivais ainsi du regard une jeune fille
arrivant de loin rue d'Alésia à Paris. Tout le long de son chemin
elle fait mine de ne pas me voir, s'engouffre dans une bouche de métro, descend l'escalier et, à l'instant où elle va disparaître,
relève la tête une minuscule fraction de seconde pour me regarder.
Le plus curieux était le
regard direct de jeunes filles qui tenaient leur cher et tendre dans
leurs bras et ne se privaient pas a son insu de me regarder, comme
les autres hommes très certainement.
En 1973, pour la première
fois j'ai eu l'occasion de me promener dans Paris au bras d'une
petite amie. J'ai alors pu observer le phénomène inverse. J'ai été
stupéfait par la quantité de jeunes filles au Quartier latin qui ne
se cachaient plus pour me regarder. J'étais en quelque sorte
« neutralisé ». Avec ma copine au bras, je ne risquais
pas de les suivre ou aborder.
Tout ce jeu de regards
cachés a disparu aujourd'hui à Paris. Les femmes regardent les
hommes. Et c'est très bien ainsi.
Un autre phénomène très
ancien a disparu aussi sans faire de bruit. Ma mère était étudiante
à Paris au début des années 1930. Je lui ai demandé ce qu'elle
avait trouvé de plus antipathique dans les mœurs des étudiants de
l'époque. A quoi elle m'a répondu : « ce qui était le plus
antipathique, c'était la pratique habituelle chez les étudiants en
médecine d'avoir une petite amie d'origine pauvre le temps de leurs
études. Dont ils se débarrassaient à la fin de celles-ci, pour
épouser une jeune fille riche. »
On trouve des traces
anciennes de cette pratique étudiante dans les gravures de Gavarni consacrées aux étudiants parisiens au XIXème siècle. Ceux-ci sont
inévitablement flanqués d'une petite jeune fille d'origine
populaire. En 1894, dans un article de « L'Illustration »
consacré à la Mi-Carême étudiante à Paris est donné à ces
jeunes filles un sobriquet : « les bachelettes ». En
1913, André Warnod, parlant de la Mi-Carême souligne le succès
remporté à cette occasion auprès des jeunes parisiennes par les
étudiants... pas toujours étudiants, d'ailleurs. Mais se faisant
passer pour tels.
Au début des années
1960, mon frère aîné fréquentait deux frères : Alain et Didier.
Alain était étudiant en médecine. Il avait une petite amie très
mignonne, coiffeuse, Joëlle. Quand il terminait ses études, Alain
subitement s'est séparé de sa petite amie et a épousé une riche
jeune femme d'origine chilienne. C'était là l'expression du très
ancien phénomène de ces sortes « d'épouses de confort »
durant le temps des études, laissant place finalement à un « beau
mariage » avec une autre. Cette pratique a très largement
disparu aujourd'hui, du fait de la féminisation des facultés. De
jeunes filles modestes, aisées ou riches elles sont pleines. Il n'y
a plus besoin de chercher ailleurs des bachelettes pour satisfaire
ses besoins naturels dans le domaine sexuel durant le temps des
études.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 4 février 2013
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