Dans ce documentaire, un
psychiatre rappelait l'explication couramment admise, en tous cas
chez les psychiatres militaires français : ce syndrome nait de la
brutale confrontation directe avec la mort. Elle trancherait avec ce
qui serait notre état moral habituel : ignorer la mort en agissant
et pensant contrairement à notre destin fatal, en faisant comme si
nous serions immortels.
Cette interprétation me
paraît fausse.
Certes, dans le documentaire, plusieurs militaires atteints avaient effectivement vu la mort de près. La leur, par exemple en sautant sur une mine, ou celle d'autres. Mais, un des militaires interviewés avait vu le déclenchement de son trouble suite à un grave accident de circulation dont il se sentait responsable. Cet accident n'avait tué personne, mais couté une jambe à un de ses camarades.
Certes, dans le documentaire, plusieurs militaires atteints avaient effectivement vu la mort de près. La leur, par exemple en sautant sur une mine, ou celle d'autres. Mais, un des militaires interviewés avait vu le déclenchement de son trouble suite à un grave accident de circulation dont il se sentait responsable. Cet accident n'avait tué personne, mais couté une jambe à un de ses camarades.
Un autre militaire malade
précisait que, suite à la réduction de sa pension d'invalidité de
50 à 20 %, il s'était senti si mal qu'il avait tenté de se
suicider.
Ces divers éléments
confirment pour moi l'hypothèse que j'avance : il existe un besoin
vital chez l'homme, l'association. Il a besoin de se sentir
appartenir au groupe humain. Quand un incident tend à le convaincre
qu'il n'en fait pas ou plus partie, il s'écroule moralement. Il
souffre de dissociation.
Quand il voit mourir de
près ou échappe de près à la mort au cours d'opérations
militaires, c'est la pensée qu'au moins un homme a voulu provoquer
cette situation. Le sentiment dissociatif, de la coupure violente
d'avec cet homme crée un choc qui amène des troubles. Quand il se
considère responsable d'un événement horrible - par exemple, un
accident entraînant l'amputation de la jambe d'un camarade, - un
homme peut se sentir dissocié des autres, parce qu'il n'a pas su
éviter le drame.
Il existe d'autres sortes
de situations dissociatives. S'agissant de viols par exemple, la
victime du viol est utilisée, n'est plus qu'un objet entre les mains
de son violeur : d'où sentiment dissociatif. Une victime de viols
incestueux m'a même exprimé son trouble d'avoir éprouvé un
plaisir physique joint à l'horreur morale au moment des agressions
subies. Elle devenait ainsi d'une certaine façon étrangère à
elle-même. La dissociation devenait interne, elle la ressentait
vis-à-vis d'elle-même et non plus simplement vis-à-vis de son
agresseur, un proche parent.
Pour se reconstituer, la
personne dissociée a besoin de se sentir à nouveau réunie. Quand
on refuse de la reconnaître malade, ce rejet peut amener une
accentuation de son mal. D'où tentative de suicide suite au simple
refus de reconnaître le juste montant de sa pension d'invalidité.
La reconnaissance du dommage subi aide les victimes à se re-associer
et donc améliorer leur santé. Cela peut prendre la forme d'une
pension, d'une reconnaissance juridique (condamnation d'un agresseur,
par exemple). Tout ce qui va dans le sens associatif améliore la
situation. On pourra utiliser le chant choral, les massages, la
poésie. Certains événements aideront aussi. Ainsi, par exemple,
une personne victime d'un viol, suivi d'une non reconnaissance de la
gravité du problème par sa famille, voit son état s'améliorer
suite à la rencontre de l'amour et une demande en mariage.
En tous les cas, il ne
faut pas perdre de vue que le sentiment d'association est pour
l'homme un besoin vital, faisant partie d'un ensemble où l'on
retrouve : boire, manger, uriner, déféquer, s'amuser, créer,
contempler, chanter, câliner, baiser, dormir, rire et respirer.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 5 décembre 2012
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