De très justes campagnes
ont insisté sur le fait que : « quand c'est non, c'est
non » s'agissant de femmes auxquelles sont faites d'explicites
propositions sexuelles. Ces campagnes réfutaient la vieille
et infecte fable patriarcale qui prétend que quand une femme dit
« non » à celui ou celle qui sollicite ses « faveurs »,
au fond elle penserait toujours « oui ». Il suffirait de
la bousculer pour parvenir à la vérité, qui serait invariablement
la satisfaction sexuelle de la personne solliciteuse.
Quand c'est non, c'est
non, nous sommes d'accord. Il est intéressant de voir comment se
pose la question quand c'est oui de la part de la femme.
Tout d'abord, remarquons
qu'il n'existe aucune manière simple, polie et « correcte »
pour dire « oui ». Mis à part le cheminement officiel
via une demande en mariage. Ce qui pose problème. Je peux demander
ou accepter fort civilement la dégustation d'un gâteau, une sortie
au cinéma, mais aller au lit faire des galipettes non. C'est tout
particulièrement vrai plus pour les femmes que pour les hommes.
Remarquons ensuite que la
femme qui dit oui prend un risque en baissant sa garde. En effet,
elle ne peut pas deviner par avance sur quel genre de comportement
sexuel elle peut tomber. Des personnes très comme il faut peuvent
réserver des surprises pas forcément positives et agréables. On
peut découvrir ainsi que quelqu'un d'apparemment équilibré ne
l'est pas du tout. Il peut par exemple être sommaire au lit :
« six minutes douche comprise » ou encore être violent.
Une difficulté
supplémentaire pour dire « oui » tient à l'automatisme
du non. Habitué à toujours dire « non », une personne
de sexe féminin ou masculin pourra spontanément dire « non »
même si après elle en ressentira des regrets. J'en parle en
connaissance de cause. Quand j'étais bien plus jeune, un jour, une
jeune fille m'a demandé directement si je voulais des petites
caresses. J'ai aussitôt et machinalement répondu « non »
et m'en suis ensuite mordu les doigts, sans savoir faire machine
arrière. Cette jeune fille m'attirait. J'ai en dépit de ça cédé
à mon automatisme négatif.
Illustration de la
difficulté à dire « oui », j'ai connu une jeune femme
qui, ayant décidé d'avoir une aventure avec un ami n'osait rien lui
demander. Elle finit par lui demander s'il avait chez lui de
l'alcool. Elle espérait parvenir en buvant à se désinhiber et
aller droit au but. L'ami n'avait pas d'alcool chez lui. Et
l'aventure projetée est tombée à l'eau.
Un obstacle
supplémentaire se dresse pour qu'une femme puisse exprimer son
désir. C'est que souvent elle justifie ses refus avec des fables et
des non-dits. Fable classique, pour repousser un solliciteur
importun, elle pourra invoquer sa fidélité à son fiancé. Qu'elle
sera en fait toute prête à cocufier sans souci si l'occasion qui se
présente lui paraît positive et l'affaire jouable. Avouer à un
homme qu'on le désire alors qu'on a joué à la sainte intouchable
auprès de lui est un peu difficile et déstabilisant. Et l'avouer
n'implique pas forcément la réussite du projet recherché.
Une jeune femme qu'attire
un homme plus âgé va passer son temps à expliquer à son entourage
qu'il n'en est rien. Qu'il pourrait être « son grand père ».
Que le sexe en général ne la passionne pas, etc. Ce discours rendra
difficile d'entrer dans le vif du sujet avec la personne ainsi
rejetée en paroles. Il faut parfois traverser un véritable no man's
land de mensonges accumulés depuis des années pour parvenir au but
recherché. Ce n'est pas évident de se dénoncer en quelque sorte
ainsi et avouer frontalement qu'on ment allégrement depuis toujours
et à tout le monde ou presque. Ce qu'on appelle « le domaine
de l'amour » est très souvent aussi le lieu privilégié du
mensonge, de la manipulation et
de l'hypocrisie. Qui sont trois des plus efficaces tue l'amour qui
existent.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 3 octobre 2017
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