Je ne suis ni pour la
dictature, ni pour la révolution, mais pour l'Humanité, un monde
amélioré, à défaut d'être parfait. Or, que ce soit dans la
démocratie comme sous la dictature, un problème est commun et
permanent : d'un côté est l'État, de l'autre l'individu, seul. Le
déséquilibre est gigantesque. Dans un petit village, par exemple,
il y a d'un côté Monsieur le Maire, de l'autre les individus,
seuls. Et que dire quand ce n'est plus simplement Monsieur le Maire,
mais Sa Sainteté le Pape, Sa Majesté l'Empereur ou Monsieur le
Président de la République ? Le déséquilibre est encore plus
massif. Quand un mouvement de protestation rassemble, le même
problème surgit. Tout de suite il y a d'un côté les chefs, les
leaders, les activistes, de l'autre, toujours les individus, seuls.
Tant qu'on ne sortira pas
de cette situation de l'individu seul face au pouvoir, si petit
soit-il, on ne risque pas d'améliorer vraiment et durablement les
choses.
L'individu seul est
faible, désarmé, influençable, apeuré, manipulable, exploitable,
fanatisable, timide, incertain, égaré.
Pourtant, il a tendance à
se regrouper : par affinités, goûts, amitiés. Concert de
hurlements des tenants des pouvoirs : c'est le communautarisme ! La
clique ! Le corporatisme ! Le gang ! La franc-maçonnerie ! La
société secrète !
Non, c'est la tendance
naturelle de l'animal social.
Il y a deux siècles, on
reconnaissait les membres d'une communauté à leur costume, langage,
contes, chants, danses, traditions culinaires, architecture des
maisons, étables. Jusqu'aux races de chèvres, moutons ou vaches
élevées qui indiquaient qu'on était Gascon, Berrichon ou
Auvergnat.
Aujourd'hui, tout est
gris. Plus de cultures régionales, on est tous Français, assis
devant le même téléviseur de merde diffusant le même programme
distractif de merde. Du moins, c'est ce que nous souhaitent nos
« élites » tout en nous crachant dessus.
Dès qu'on invoque une
culture régionale de bonnes âmes nous traitent de fascistes. Danser
la bourrée auvergnate ou la gavotte, parler Breton ou Flamand de
Dunkerque, seraient assimilables à une volonté scissionniste et
insurrectionnelle.
Le seul groupe local que
les États encensent, c'est « la famille ». En lui
souhaitant de servir de courroie de transmission au pouvoir d'État.
Il existe une forme de
structure politique, artistique, sociale, poétique qui était à la
base de la festivité partout en France. Et l'est encore à Dunkerque
et dans sa région : la goguette.
C'était des groupes de
moins de dix-neuf personnes, se réunissant ponctuellement pour
passer un bon moment ensemble, boire, manger, rire, bavarder,
plaisanter, danser, chanter des chansons.
A Dunkerque, dans sa
région, suivant l'amplitude traditionnelle des équipages des
navires de pêche morutière, les groupes sont de douze. La
fraternité et le Carnaval disparues ailleurs continuent à prospérer
grâce au maintien de ces sociétés douzainières (composées de
douze membres). Parlant des prémisses de la Commune de Paris de
1871, un auteur signalait l'existence de groupes indépendants
proches, formés d'une dizaine de membres chacun. Ne serait-il pas
juste et intéressant de propager cette forme de rassemblements
douzainiers partout, pour humaniser la société ?
Basile, philosophe
naïf, Paris le 1er décembre 2013
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire