Quand le cinéma est né
en 1895, c'était un art forain. Il servait de curiosité, attraction
et divertissement. On ne le considérait pas comme un art. Durant des
décennies, réduit à un produit de consommation à durée limitée,
les films connaissaient une carrière éphémère. Après une année,
on ne le revoyait plus. Quand bien-même ils avaient couté très
cher à réaliser et s'étaient assuré le concours de vedettes
célèbres. Les films finissaient à la poubelle. Plus précisément,
les bobines étaient traitées avec une machine à casser les films.
Une sorte de croix métallique qui les réduisait en morceaux. Les
morceaux servaient à fabriquer, par exemple, des peignes.
Puis vinrent des
initiatives pour sauvegarder et respecter les films. Les considérer
comme expressions d'un art à part entière. Ce fut la naissance des
cinémathèques. Mais, longtemps encore, les films anciens n'eurent
la possibilité d'être vus que dans des salles spécialisées.
Aujourd'hui, à la télévision on voit des films anciens. Et leurs
fans ne se comptent plus par centaines, mais par nombreux milliers.
La situation du cinéma à
ses débuts est toujours celle que connaissent chez nous les
chansons. Passée leur heure de gloire, la plupart disparaissent de
circulation.
On va justifier cette
situation en déclarant que : « le goût a évolué ».
Quel goût ? La plupart des gens ne connaissent simplement pas ce qui
se chantait dans le passé. Comment peut-on ainsi affirmer que ces
chansons ne plaisent pas. Ne correspondent pas aux sensibilités
actuelles ?
Un propos classique qu'on
entend tenir s'agissant de l'art est que ce qui est bon reste dans la
mémoire. Le reste est oublié. Ce propos justificateur est
totalement fantaisiste ou presque. Certes, des œuvres sans envergure
sont oubliées. Mais des chefs-d'œuvre le sont également. Et des
auteurs et courants artistiques très importants sont minimisés ou effacés dans les livres
d'histoire officielle.
Quelques exemples :
Houdart de La Motte, illustre dramaturge, Évariste Parny, poète,
dont Pouchkine disait : « c'est mon maître »...
Un phénomène peu connu
est le suivant : en France, la centralisation administrative du pays
qui a conduit à la destruction volontaire des langues régionales,
n'a pas touché que la littérature dite « patoisante ».
L'élitisme parisien a voué à l'oubli de grands écrivains de
langue française dont le crime est d'être resté provinciaux sans
chercher à se naturaliser parisien.
Je connais au moins deux
exemples. Il en existe certainement beaucoup d'autres. Ernest
Chebroux, poète, bien que devenu parisien, restait de cœur un
Poitevin. Il éditait des poèmes à Limoges ! Dans ces conditions son
magnifique poème Les rives du Clain sera absent des manuels
scolaires.
Autre exemple : Gabriel
Monavon, qui vécut au XIXème siècle, est un des plus grands poètes
français. Avantage de son écriture, non seulement elle est très
belle, mais se lit facilement. C'est du français facile à
comprendre. Alors, pourquoi Gabriel Monavon est-il aujourd'hui pour
la plupart un parfait inconnu ?
Réponse : parce qu'il
était avocat et juge de paix à Grenoble. Qu'il n'a pas cherché
à se parisianiser. En tous cas, il était très satisfait de
recevoir pour son poème La Chanson de la brise une
distinction décernée par l'Académie Jasmin d'Agen. Pour les snobs
officiels de Paris, quelle vergogne, quel ridicule ! Alors, Gabriel
Monavon, on l'oublie.
Basile, philosophe
naïf, Paris le 12 mai 2013
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire