Je lisais récemment le
compte-rendu d'un procès. Un homme âgé avait, il y a bien des
années, commis tout une série de crimes. Puis s'était rangé.
Ne faisait rien. Ni n'encourageait qui que ce soit à continuer ses
méfaits. On fini par l'arrêter. Le juger. Le condamner à passer
douze longues années derrière les barreaux. Il sera probablement
mort avant la fin de sa peine. Je me suis posé la question : « à
quoi ça sert ? » A faire plaisir à ses victimes ? Il s'agit
alors d'une jouissance sadique : « tu m'as fait mal, je te fais
souffrir à mon tour. » Avons-nous là affaire à une morale de
voyous drapée dans la toge du prétoire ? Les juges dans la Mafia
agiraient de la même façon. Devons-nous faire comme eux ? Est-ce
bien ainsi ?
Bien sûr, à priori,
savoir puni un criminel nous paraît juste et positif. Mais si, au
lieu de théorie, nous imaginions être concerné. Telle personne qui
nous a fait effectivement du tort, est jugée et emprisonnée. Ça
sert à quoi ? Ça répare quoi ? Rien !
Le propos classique
entendu est : le criminel qui a commis un crime et va expier derrière
les barreaux « paye sa dette à la société ».
Quelle dette et payée à
qui ? Et qui c'est « la société » ?
Il y a peu d'années, j'ai
connu un homme qui m'a dit avoir tué quelqu'un quand il était ivre. Condamné
pour meurtre, il avait passé dix ans en prison.
La société, c'est nous,
l'ensemble des individus. Alors, cet homme, qui fait également
partie de la société s'est payé une dette à lui-même ? C'est
absurde !
Et moi, qui fait partie
aussi de la société, cet homme m'a payé une dette ? Je n'ai
absolument pas ressenti cette impression.
Il y a plus de vingt ans,
j'ai connu un homme qui s'est vanté devant moi d'avoir jadis fait
partie d'un gang de voleurs de voitures. Il n'avait jamais été
pris. J'ignore s'il disait vrai ou non.
Il m'a dit : « bien
sûr, si tu te fais prendre, ça te fait tout drôle. »
S'il disait la vérité
et si je suit la logique de « la dette à la société »,
cet homme me doit une dette qu'il a réussi à ne pas payer.
Je n'ai pas, non plus, à
son contact, ressenti cette impression.
Et si, accusé, vous avez
un bon avocat, vous risquez une peine plus légère que sans. Alors,
la dette est variable en fonction de votre possibilité de disposer
d'un bon avocat pour vous défendre ?
Tout ceci me parait bien
absurde.
Et je n'ai pas
l'impression, si je longe les hauts murs de la prison parisienne de
la Santé qu'elle soit remplie par mes débiteurs.
Ni que les actuels 60 000
détenus des prisons françaises - et les centaines de milliers
d'autres de par le monde, - soient actuellement en train de me régler
la dette qu'ils me devraient à moi et à environ six milliards et
demi d'autres êtres humains composant « la société ».
Basile, philosophe
naïf, Paris le 3 juillet 2013
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